Nathalie Bulle propose un texte programmatique sur les grandes directions que devrait emprunter l'école pour être plus juste. Ces dernières concernent sa mission fondamentale de développement intellectuel et culturel et les opportunités véritables de réalisation individuelles qu'elle devrait offrir.
Cet article examine comment l’affaiblissement d’une certaine culture à l’école entraine une fragilisation des liens sociaux, et dans quelles mesures il concourt à freiner le développement culturel de la société en rendant ce dernier de plus en plus inégalitaire. Il s'agit aussi de montrer pourquoi la transmission de la culture est la meilleure préparation à la citoyenneté, et que l'employabilité ne doit pas être le seul horizon de l'Ecole.
En finir avec la reproduction des inégalités, c’était apprendre à apprendre. Ainsi cesserait l’injuste avantage d’un héritage familial. Passé bien des déboires, l’enseignement « par compétences » est pour cela devenu, insensiblement, pédagogie officielle de l’école, de la maternelle au lycée. Si bonnes sont ses intentions, le récent projet de refonte d’un « socle commun », proposé à la consultation en octobre 2014, est comme le symptôme d’une faiblesse congénitale de cette pédagogie. Tout y tient d’une « capacité à mobiliser des ressources », à la nature et à l’acquisition incertaines.
Si l’on en croit Vincent Peillon, ce n’est pas une simple réforme de notre système éducatif qu’il a présentée à l’Assemblée nationale au début de cette année, mais une véritable refondation de l’école de la République. Cependant, son projet de loi ne marque aucune rupture véritable avec les politiques antérieures. Il y est, certes, beaucoup fait référence aux valeurs de l’école républicaine, mais on en reste au niveau de l’incantation, et c’est particulièrement visible quand on examine attentivement la partie du projet relative à l’enseignement primaire, comme le montre ici Alain Planche.
Les changements pédagogiques dans la plupart des systèmes éducatifs occidentaux visent aujourd’hui au développement de compétences générales, et s’appuient sur des notions telles que l’interdisciplinarité, les situations d’apprentissage, l’interaction entre pairs etc. Ils s’opposent aux principes généraux d’une éducation dite libérale qui associent le développement intellectuel à des formes théoriques d’apprentissage – c’est-à-dire explicites et développées suivant la logique des disciplines elles-mêmes. Une explication de ce conflit est offerte à partir du rôle joué par les présupposés épistémologiques en jeu – étroitement liés à des présupposés psychologiques.